

Arthur Rimbaud, Publié en 1872
Une poésie située en France après la guerre franco-allemande de 1870. L’allégorie des corbeaux dans Les Corbeaux reflète le climat historique et social de l’époque, en particulier la défaite de 1870 face à l’armée prussienne et les morts qui ont suivi la Commune.
Seigneur, quand froide est la prairie,
Quand dans les hameaux abattus,
Les longs angelus se sont tus
Sur la nature défleurie,
Faites s’abattre des grands cieux
Les chers corbeaux délicieux.
Armée étrange aux cris sévères,
Les vents froids attaquent vos nids!
Vous, le long des fleuves jaunis,
Sur les routes aux vieux calvaires,
Sur les fossés et sur les trous,
Dispersez-vous, ralliez-vous!
Par milliers, sur les champs de France,
Où dorment les morts d’avant-hier,
Tournoyez, n’est-ce pas, l’hiver,
Pour que chaque passant repense!
Sois donc le crieur du devoir,
Ô notre funèbre oiseau noir!
Mais, saints du ciel, en haut du chêne,
Mât perdu dans le soir charmé,
Laissez les fauvettes de mai
Pour ceux qu’au fond du bois enchaîne,
Dans l’herbe d’où l’on ne peut fuir,
La défaite sans avenir.
Translated by Tom Sharp
A poem set in France after the Franco-German war of 1870. The allegory of the crows in Les Corbeaux reflects the historical and social climate of the time, especially the defeat of 1870 against the Prussian army and the deaths that followed the Commune.
Lord, when the meadow is cold,
When in the hamlets that have been destroyed,
The long angelus have fallen silent
On nature that has lost its flowers,
Make the dear delicious crows
fall from the great skies.
Strange army with severe cries,
The cold winds attack your nests!
You, along the yellowed rivers,
On the roads with old calvaries,
On the ditches and on the holes,
Disperse, rally!
By the thousands, on the fields of France,
Where the dead of the day before yesterday sleep,
Whirl, won’t you, winter,
So that each passer-by thinks again!
Be then the crier of duty,
O our funereal black bird!
But, saints of heaven, at the top of the oak,
Mast lost in the charmed evening,
Leave the warblers of May
For those who are chained deep in the woods,
In the grass from which one cannot flee,
The defeat without a future.